KAREN FARKAS
« Le désir, seul ressort du monde, le désir, seule rigueur que l’homme ait à connaître, où puis-je être mieux pour t’adorer qu’à l’intérieur du nuage ?"
André Breton , L’Amour fou
Nous cherchons sans cesse au dehors un objet du désir. Or le trouble est l’un des aspects de l’intériorité de l’homme.
Le peintre ici n’est pas un voyeur : il exprime une vision intérieure, voire introspective. Esquisser les corps pour peindre l’âme :
l’ irruption du désir et sa menace sont les motifs de ces nus.
Attente ou étreinte, plénitude ou absence,
le désir exige l’empire sans partage.
Ses humeurs imposent leur rythme au tableau qui avance par pulsions successives dans l’alternance incessante de l’attente et de la complétude.
A l’étreinte correspond le trait incisif du fusain, l’élan du geste pictural, l’attraction des couleurs. A l’absence répond l’étendue des blancs, le basculement et la chute toujours possible des figures, la trompeuse fragilité des couleurs étirées en jus, à la limite de la transparence.
Abstraction, narration ou bien abstraction narrative ? Le récit est regardé à cette distance d’où toute une scène peut être réduite à quelques phrases. L’inconscient s’immisce dans les ellipses du langage comme dans l’écriture automatique.
Chaque geste est intentionnel et dirigé. Mais la tache survient, et surprend comme le hasard d’une rencontre. Le dessin, la peinture auront d’autant plus une raison d’être qu’ils seront logiques et impossibles en même temps.
La touche est imprévisible mais le résultat toujours très précis.
A la fin il émane curieusement de ces tableaux, à la manière des paysages,
un sentiment de sérénité.
Karen Farkas